Une nouvelle journée de cours de finie.

Je rangeai rapidement mes affaires et sortis en silence, la mine froissée. L'exclusion de Molly a fait pas mal de bavardages dans la classe. Ils m'ont tous cassé les couilles à parler dans son dos. Qu'elle ait foutu en l'air ses chances c'est une chose. Mais qu'ils arrêtent d'agir comme si ce n'était pas non plus de leur fait. Ils ont senti sa fragilité et l'ont poussée à bout. De vrais connards ces gens, comme partout ailleurs. Son seul tort a été de refuser le fait que pour survivre dans un système, il faut se créer une place dans ce système sinon on se fait dégager. C'est d'autant plus vrai pour des gens comme nous qui vivons dans un milieu de merde. Il faut s'adapter. Elle s'y est butée et a échoué.

J'avais décidé de ne pas prendre sa défense en cours. Ça ne sert à rien de défendre ceux qui ne seront plus là. Mais quand ce crétin de fils à papa de Miguel s'est mis à dire "Pas étonnant qu'elle ait foiré sa vie dès le début vu le métier de merde de sa mère", tout en faisant l'exercice donné par le prof, je crachai froidement :

- Dis Miguel, t'as pas des maths à réviser au lieu de cracher sur la vie des autres ? J'ai cru comprendre que ton papa chéri n'était pas très content de ton dernier 3/20. Ce serait con que tu te fasses déshériter tout ça parce que t'as pas été foutu d'avoir la moyenne pour une matière aussi basique. Tu risquerais de travailler à un cabaret pour joindre les deux bouts à la fin du mois, ce serait terrible ça.

Je ne sais pas ce qui m'avait pris de sortir ça. J'avais juste envie de l'humilier un coup.

- ... C'est quoi ton problème ?

Je relevai la tête et plantai mes yeux sur son visage.

- Hm ? Mon problème ? Mais je n'ai pas de problème. Par contre toi tu risques d'avoir de gros problèmes avec ton papa si jamais il apprenait que tous tes bons DMs sont pondus par ta chère amie Aristide. T'es sûr de vouloir pousser la discussion ?... Non. C'est ce qu'il me semblait.

C'est sur ces paroles de menace que je le plantai, replongeant stoïquement dans mon travail. Il resta quelques instants la bouche ronde. Il n'avait jamais été très fort pour mettre en place des argumentaires ni quoi que ce soit de constructif de toute manière.

Ainsi en une journée, je me créai au minimum deux hostilités. Mais je n'étais pas inquiète. J'étais trop bordée de piques pour qu'ils ne tentent même de me briser comme pour avec Molly. Surtout qu'ils savaient que ma méchanceté était sans pitié. Je n'avais pas forcément besoin de leur éclater les dents pour leur faire mal. Non... Mon venin était plus vicieux que ça. C'est ce qui m'a toujours protégé jusque-là. Ils le craignent.

Dans une des rues menant à chez moi, j'aperçus une scène qui me déplut profondément. Je me sentis serrer les dents et grogner sourdement.
Putain.

C'était Molly, ou plutôt un gosse aux proies de Molly.

J'arrivai sur elle et la poussai à l'épaule avec ma paume, dégageant le chemin pour le gosse terrorisé. En soi ma poussée était forte mais pas brutale, elle visait plus à l'écarter qu'à lui foutre un bleu. Les sourcils froncés et une grimace agressive sur les lèvres, je crachai :

- Tu crois faire quoi là ?